Il y a une semaine, nous étions dans l'oeil de la tornade/de l'ouragan/des Hurricanes, appelez-ça comme vous le voulez, mais nous étions dedans. Certains y voyaient la fin, d'autres gardaient espoir, mais la poursuite "Karmanos" fut la bombe qui explosa les attentes de tous.
Effectivement, le 30 mai dernier, nous apprenions que Peter Karmanos, Jr. Stock Limited Partnership, entitée composée de Peter Karmanos Jr (PKJ), propriétaire des Canes et détenteur de 34% des parts de l'entitée, ainsi que de ses trois fils (TrioKarma), détenteurs de 66% du partenariat, poursuivait Peter Karmanos Jr. pour le montant 105,6 millions de dollars US (101,3 millions + 4,3 millions d'intérêts). Je ne tenterai pas d'expliquer la toile d'araignée derrière laquelle PKJ avait octroyé le 101 millions sous forme de trust au TrioKarma, par contre je vais expliquer ce qu'est un trust.
Le trust, dans ce cas-ci, est lorsqu'un montant d'argent, détenu par son constituant (PKJ) est confié à un détenteur et bénéficiaire (TrioKarma). Ce que l'on doit comprendre du mot "bénéficiaire" dans ce trust, c'est qu'il est de caractère "irrévocable", c'est-à-dire que le constituant ne peut décider de changer de bénéficiaire à moins que ce dernier accepte le changement. Ici, l'entitée bénéficiaire (TrioKarma) avait concédé, selon les termes stipulés dans un contrat notarié, le 30 juin 2013, que le constituant (PKJ) reprenne le montant de 101,3 millions de dollars sous la condition que ce dernier le remette, jusqu'en 2022, sous forme de plusieurs versements annuels. Vous me suivez toujours? On peut prendre une pause sinon.
Ce qui a mené le TrioKarma à poursuivre PKJ, c'est qu'il était en défaut de paiement depuis le tout début et qu'il est stipulé dans les termes du contrat que si cela arrivait, ils auraient droit, et ce immédiatement, au montant de 101 millions + intérêts. On réclame donc, du côté du TrioKarma, ce que PKJ leur devait, soit 101 millions de dollars + les intérêts de l'époque.
Le problème, encore une fois, c'est qu'en date du 25 mai 2016, le trio Karmanos n'avait pas encore reçu leur dû; Ils se sont donc vus obligés, le 26 mai 2016, de poursuivre en justice le père. Ouf hein?! Vous pouvez jeter un oeil sur le lawsuit en cliquant ici.
Soyez assurés que la poursuite sera de courte durée. Rien n'est en faveur de notre "proprio préféré".
Là vous vous demandez: Pour quelle raison Peter Karmanos Jr. aurait-il décidé de piger dans le trust de ses enfants au lieu de demander à une banque de lui prêter de l'argent? Il n'a plus de liquidités. Les banques lui refusent ses demandes de prêt puisqu'il n'offre aucune garantie et que son seul actif pouvant garantir un prêt depuis la vente de Compuware c'est les Hurricanes de la Caroline... Et on le sait tous, les Hurricanes sont un gouffre financier; ne vous demandez pas où est parti l'argent de la vente des parts de Compuware. Tout l'argent que PKJ met dans cette franchise disparait; tout comme les fans... pourtant à ce qu'il parait on les voit, les fans... selon le p'tit gars dans le film "Le Sixième Sens".
Ceci était l'arbre.
Maintenant, l'écorce:
Peter Karmanos Jr. est non seulement le propriétaire de l'équipe ayant le "meilleur bail" de la ligue, mais il fait aussi partie du Board of Governors (BOG). Ayoye hein? Le gars est bien placé. Par contre, la LNH a intérêt à avoir une équipe de gouverneurs immaculés puisque c'est l'entitée qui représente la ligue... Et ils commencent à être impatients de ne pas revoir l'argent qu'ils ont gaspillé pour le maintien des Coyotes de Phoenix/Arizona/Glendale/Alouette!... Et les Hurricanes vont devoir bénéficier d'un autre prêt de la LNH encore cette année.
Pour couronner le tout, il fallait en plus que la nouvelle que l'un des leurs n'ait pas la capacité de soutenir financièrement son équipe, au point même de voler l'argent de ses enfants, devienne publique. C'est la débandade. C'est la grande débâcle.
Je vous invite à lire la chronique "Jets 2.0?" de Fred Poulin pour avoir le reste de l'écorce.
Pourquoi PKJ est en ce moment entre l'arbre et l'écorce et que le tout pourrait bénéficier Québec?
Gary Bettman et Bill Daly ont compris que ce qui se passe est rendu trop gros. La nouvelle est sortie; Les Hurricanes sont insolvables.
C'est donc pour cette raison là que le discours a changé depuis le State of the League: Aujourd'hui, non seulement on en parle finalement, mais selon Bill Daly, Québec est une candidature impressionante. On est devenus, tout à coup, un réel candidat. Ce n'est plus Las Vegas et rien d'autre. Cela s'appelle "la LNH qui ne veut pas perdre la face". Dans mon livre à moi, la LNH prépare la table pour la relocalisation. Ça vaut la peine d'écouter l'entrevue à Sportsnet (4:40).
Là je vous vois arriver... "Dollar canadien"... "Marché québécois"
Désamorçons deux mythes de façon simple:
- La "petitesse" du marché québécois: Le Québec vit de hockey. La population québécoise est maintenant bien mieux nantie qu'en 1995. À quoi cela sert d'avoir une équipe dans une ville incroyablement populeuse quand la très grande majorité des gens se foutent du hockey? Comment expliquer que les arenas de "fameux gros marchés" soient vides? Pour quelle raison est-ce que la population, tout court, serait un bon argument? À Raleigh il y a 1 million de personnes qui se foutent du hockey. À Québec il y a 500 000 personnes qui aiment le hockey, sans compter les régions avoisinantes qui ont aussi développé un pouvoir d'achat important (la Beauce notamment).
- Le dollar canadien: Un Québécois et un Américain jasent autour d'une bière. L'Américain dit: "Je suis plus riche que toi. J'ai 100$ américains et toi ton cash est en dollar canadien.". le Canadien dit: "Woh menut'! J'ai peut-être de l'argent canadien mais c'est 150$... Si je le change en américain, je suis tout de même plus riche que toi.".
Québecor est une entreprise canadienne richissime. En plus d'avoir plus de moyens que la plupart des propriétaires de "gros marchés" américains, ils sont une entreprise de communication. Les revenus de télé de la LNH c'est pour eux, les journaux, les émissions de télé, TVA Sports, etc. En plus d'avoir plus de moyens que la plupart des propriétaires américains, les Nordiques leur ramèneraient de l'argent en produit médiatiques dérivés. Écoutez, c'est un investissement, point.
Karmanos est entre l'arbre et l'écorce pis Québecor, silencieusement, arrive avec la hache.
Relo 2016.
Commentaires
Pas pour 2016. La poursuite va trainer, ca va prendre des mois et des mois à regler.
Si tout ça avait sortit plus tôt en février ouben mars, il y aurait eu des chances mais là y faut arrêter de rêver en couleur.
Pas de transfert pour cette année, mais 2017 oui.
Excellente chronique! Tout se tient et on saura très bientôt si nous aurons notre équipe ou plutôt, quand nous aurons notre équipe!
Pour ce qui est de la déclaration de Brian Mulroney, celui-ci est un fin renard, et chaque phrase qu'il prononce est très bien pensée avant d'être dite.
Tout est stratégique.
Bravo encore!
bravo encore! tu écris très bien! et je suis d'accord avec tes points de vues!
De mon côté, j'ajouterais ceci.
Karmanos a créé cette fiducie en 1996 selon ma compréhension, alors qu'il n'avait que 3 enfants d'un premier mariage. En 2005, Karmanos s'est remarié et aurait eu 4 autres enfants. Évidemment, en 1996, lorsqu'il a constitué cette fiducie, il ne pensait sûrement pas avoir d'autres enfants, car il avait 53 ans.
Pour avoir été obligé d'emprunter de l'argent de la fiducie, qui ne lui appartient pas, mais appartient bel et bien à la fiducie, il devait être très mal pris financièrement. Il a d'ailleurs vendu Compuware et son équipe junior dans la OHL à cours des deux detnières années. Il a 73 ans, doit 105M$ à la fiducie et veut sûrement laisser de l'argent à sa femme actuelle (au moins 20 ans plus jeune selon ma compréhension) et ses 4 autres enfants.
Au surplus, il est en chicane avec ses 3 premiers enfants. Il a même congédié un de ses fils il y a 2 ans je crois, et celui-ci est maintenant dans l'organisation des Penguins, avec l'ancien DG de la Caroline Jim Rutherford, lui aussi congédié par Karmanos. Karmanos avait également congédié il y a 1 an ou 2 son VP Finance qui travaillait pour lui depuis 30 ans.
Si Québec paie 400M$ à Karmanos et 100M$ de frais de relocalisation à la NHL, les problèmes de Karmanos, de la fiducie, de la femme de Karmanos et de ses 4 derniers enfants seraient réglés. Toutefois, la passion de Karmanos pour le hockey semble être devenue de la folie. Bettman, les autres proprios et sa famille auront besoin de lui mettre beaucoup de pression au cours des prochains jours pour qu'il lâche prise. La NHL lui a déjà donné ce qu'il voulait l'automne dernier, une place comme bâtisseur au Temple de la renommée du hockey.
J'aime que Karmanos n'ait encore rien dit, et que les commentaires du président de l'entité gouvernementale propriétaire de l'aréna se réfère à des promesses de Karmanos datant de 5 à 8 semaines, et non à des propos des 2 ou 3 derniers jours.
Finalement, un élément important est que le groupe de propriétaires minoritaires aura une importante décision à prendre d'ici cette automne, soit de devenir propriétaire partageant dans les pertes et les profits de l'équipe (plus probablement des pertes si l'équipe demeure en Caroline, mais des profits si l'équipe est vendu 400M$ après cet automne), ou soit se faire rembourser leurs parts et ainsi s'assurer de ne rien perdre. Dans ce cas, Karmanos devra racheter leurs parts alors qu'il ne semble pas avoir d'argent, et alors qu'il ne trouve aucun investisseur pour garder l'équipe en Caroline. Si les propriétaires minoritaires décident de demeurer propriétaires, ils devront eux aussi fournir de l'argent pour payer les pertes qui sont probables si l'équipe demeure en Caroline (cash call).
À suivre...
Go 2016